Les démarches d’instruction des demandes de permis et d’autorisations pour les Grandes Installations Solaires Thermiques (GIST) sont aujourd’hui un parcours du combattant à l’issue improbable. Non reconnues comme des équipements d’intérêt collectif, ces centrales sont considérées comme « artificialisantes » et comptabilisées à ce titre dans le calcul de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers. En clair, elles sont bloquées par le cadre réglementaire.
Une situation absurde alors qu’elles devraient fortement contribuer à la décarbonation du pays en substituant du gaz fossile, si l’on en croit le projet de Programmation Pluriannuelle de l’Energie dévoilé le 4 novembre dernier. Il faut être clair, nous n’atteindrons pas l’objectif des 6 TWh de chaleur solaire en 2030 fixé par la PPE, si les Grandes Installations Solaires Thermiques demeurent entravées par la réglementation !
L’espoir d’un « bougé législatif » pour sortir de l’absurdie est venu du Sénat, avec la récente proposition de loi « Programmation et simplification dans le secteur économique de l’énergie », adoptée le 16 octobre et transmise à l’Assemblée nationale. Le texte prévoit d’inclure l’énergie solaire thermique dans le dispositif dérogatoire de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers, étendant aux grandes installations solaires thermiques une dérogation déjà reconnue aux centrales photovoltaïques.
Espérons que cette disposition perdure lors du passage du projet de loi à l’Assemblée nationale. Cet examen devant les députés pourrait en outre permettre de reconnaitre à ces installations la qualité d’équipements d’intérêt collectif. A date, seuls les ouvrages de production d’électricité ont été considérés comme telles, car elles contribuent à la satisfaction d’un besoin collectif par la production d’électricité vendue au public. Nous pouvons légitimement considérer que contribuer à décarboner le pays (réseaux de chaleur et industries) avec des calories solaires relève de l’intérêt général.
Si la voie législative nous donne quelques espoirs de voir débloquer la situation, son issue est encore incertaine. Le gouvernement pourrait se saisir dès à présent de la question par voie réglementaire. Ainsi les éoliennes, si elles ne sont pas expressément envisagées par le dispositif dérogatoire de la consommation d’espaces NAF, ont fait l’objet d’une précision du gouvernement dans le fascicule 1 « Définir et observer la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers et l’artificialisation des sols » publié en décembre 2023 qui indique que les éoliennes n’entrent pas elles-mêmes dans la catégorie des installations consommatrices d’espaces NAF.
Il est tout à fait envisageable de transposer cette interprétation pour les installations solaires thermiques, vu leur faible emprise au sol. Une circulaire d’interprétation pourrait être envoyée aux services instructeurs via les préfectures, afin d’harmoniser leur lecture dans le cadre de l’instruction administrative des projets de grandes installations solaire thermique en cours.
Cela fait bientôt 1000 jours que la guerre d’agression russe en Ukraine a éclaté. Nous devons toujours redoubler d’efforts pour nous affranchir totalement du gaz russe, et limiter notre usage du gaz de schiste fortement carboné importé des USA. Il devient urgent de libérer de leurs entraves administratives les grandes installations solaires thermiques afin qu’elles contribuent à l’effort collectif.