Jean-Pierre CLAMADIEU, président du CA d'ENGIE, est intervenu lors des dernières rencontre économique d'Aix-en-Provence :
« Je voudrais effectivement partager avec vous quelques convictions en fait quatre convictions la première c'est que la transition énergétique aujourd'hui est en marche c'est une réalité concrète. Trois chiffres qui l'illustrent :
1 - Nous avons en 2023, 44 % de l'électricité produite en Europe l'a été à partir de sources renouvelables (hydraulique, éolien, solaire) ceux qui pensent que les éoliennes sont là pour faire joli ou pas joli dans nos paysages se trompent complètement. C'est une réalité on sera à plus de 50 % en 2024.
2 - deuxième chiffre, on aurait dû le célébrer, on ne l'a pas fait : 5 % de réduction des émissions de gaz et effet de serre en France en 2023. On a dit que ce sont des conditions exceptionnelles. Au premier trimestre 2024 on est un petit peu au-delà de ce chiffre donc oui, un pays comme la France s'est engagé dans une trajectoire de réduction de ses émissions de CO2.
3 - Dernier chiffre, qui nous éloigne un petit peu de de nos territoires. L'an dernier 500 GW de capacité renouvelable nouvelle connecté dans le monde et tenez-vous bien, 60 % en Chine. La Chine décarbone son économie à grande vitesse.
Engie prend sa part à ces à ces projets. Nous investissons aujourd'hui 5, 6, 7 milliards d'euros chaque année. Ça fait beaucoup, nous les investissons pour développer ces solutions renouvelables et ces systèmes donc c'est une réalité…
Deuxième message : ça a des effets positifs et parce que nous acquérons ainsi notre indépendance. L'Europe n'a pas de source d'énergie fossile sur son territoire, en revanche l'énergie bas carbone nous donne accès à une forme d'indépendance énergétique c'est à terme une énergie plus compétitive. C'est là le point délicat, parce que quand vous recevez vos factures d'électricité, vous ne le percevez pas, mais nos projection à la fin de cette décennie montre qu'effectivement en ce qui concerne les électrons verts, les molécules vertes, nous verrons des baisses de prix liées aux investissements que nous réalisons aujourd'hui, parce que cette énergie renouvelable est tellement présente certains jours qu'on voit les prix de l'électricité chuter brutalement. Et puis c'est l'occasion de construire des chaînes d'approvisionnement européennes qui reposent sur l'industrie européenne. Alors on ne peut pas tout défendre et je suis de ceux qui pensent que pour les panneaux solaires la bataille est sans doute perdue, sur les éoliennes, sur le nucléaire, sur les
Batteries, il y a des opportunités d'investissement importantes liées à la transition énergétique. En France aujourd'hui 170000 emplois sont liés à cette transition énergétique.
Le troisième message c'est qu'il faut bien sûr quelques ajustements pour qu'on puisse continuer ce parcours et c'est là où on revient aux questions de d'organisation des marchés, il faut des règles du jeu stable, il faut surtout message pour nos amis parlementaires européens récemment élus, il faut des règles plus simples, plus pragmatiques. On a été très loin dans la sophistication, on a défini ce qui était de l'hydrogène vert en Europe avec un tel degré d'intelligence qu'on n’arrive pas en produire. Donc il faut qu'on soit simple et il faut qu'on arrive à avancer. Il faut qu'on soit très attentif au coût, on ne l'est pas assez, il y a des solutions de transition coûteuses, il y a des solutions qui le sont moins, il faut que nos décideurs soient attentifs à la capacité pour les entreprises et les particuliers d'avoir accès, concrètement, à cette transition et ça, c'est le défi de la prochaine Commission. C'est d'être attentif à ces aspects et puis il y a des angles morts, vous les évoquiez tout à l'heure, qui nécessitent des investissements privés. Si le cadre est clair ou public ce sont des investissements en infrastructure pour permettre d'amener cette électricité renouvelable des points de production vers les points de consommation, pour créer les systèmes de stockage qui font que l'électricité a prix négatif du dimanche, on soit capable de l'utiliser à un prix raisonnable le lundi et donc ça ce sont les enjeux des prochains mois.
Et puis quatrième point, quand on regarde la situation d'aujourd'hui et qu'on le compare aux trois points que je viens d'évoquer, qui disent que finalement tout va bien. Non il y a quelque chose qui ne va pas bien, c'est qu'on n’a pas réussi à entraîner nos concitoyens pour leur montrer que cette transition énergétique ou que cette transformation de l'économie, est accessible. Elle est concrète et en particulier en France qui a une position plutôt favorable du fait de la présence de diverses catégories d'énergie verte, le nucléaire, le biométhane aussi bien sûr le renouvelable. Nous n'avons pas réussi à convaincre nos concitoyens que c'est un projet qui les concerne et je pense que nous, dirigeants de grandes entreprises, on ne peut pas se dire « ce n’est pas notre sujet, c'est celui des élus, c'est celui des autres », nous sommes concernés et ceux qui assistent à ces Rencontres d’Aix depuis quelques années ont vu des sujets comme la stratégie des groupes, la raison d'être devenir un thème très important. Nous faisons tous ici des efforts pour engager nos salariés le covid a été l'occasion d'actions de solidarité remarquables et pourtant quand on regarde les résultats de dimanche dernier on voit qu'il y a beaucoup de gens qui sont très sceptiques, au bord du chemin, quelquefois au bord de la révolte, et ça nous amène à devoir nous poser des questions. Comment est-ce qu'on peut faire mieux ? Comment on peut engager nos salariés ? Comment on peut engager nos Supply Chain, nos fournisseurs, nos clients ? Pour employer des mots tout simples. Comment peut-on engager les territoires sur lesquels on intervient ? On n'a pas su très bien faire, on n’a peut-être même pas su bien faire. Je m'exprime bien sûr à titre personnel et pas spécifiquement au nom de d'Engie sur ce sujet, il faut qu'on quitte ces Rencontres avec l'envie de faire beaucoup plus et beaucoup mieux sur ces thèmes. »
Il est possible de visionner l'intégralité de la session « Un autre modèle de croissance est possible » avec les intervenants suivants:
Véronique BÉDAGUE - Présidente Directrice Générale - Nexity
Jean-Pierre CLAMADIEU - Président du Conseil d'administration - ENGIE
Sylvie JÉHANNO - Présidente Directrice Générale - Dalkia
Tatiana MOLCEAN - Secrétaire Exécutive - United Nations Economic Commission for Europe
Philippe WAHL - Président Directeur Général - Groupe La Poste
Coordinatrice : Isabelle MÉJEAN - Membre - Le Cercle des économistes
Modérateur : François LENGLET - Journaliste - TF1 & RTL