Et si les parangons du modèle capitaliste se mettaient vraiment au vert ? Un groupe composé de multinationales et d’institutions pesant 37 000 milliards de dollars d’actifs a fait une demande spécifique aux 1 000 plus grandes entreprises de la planète : fixer des objectifs d’émissions de gaz à effet de serre conformes à l’objectif de 1,5 °C de l’accord de Paris. Cet objectif de réduction des émissions doit cependant être approuvé par le biais de l’initiative Science Based Targets, la norme de l’industrie pour les objectifs climatiques crédibles qui couvrent toutes les émissions de la chaîne de valeur d’une entreprise. La campagne 2022 CDP Science-Based Targets est coordonnée par le CDP mondial à but non lucratif, qui gère le système mondial de transparence environnementale.
48% de toutes les entreprises ciblées sont basées dans la région Asie-Pacifique
Le CDP a envoyé des lettres à plus de 1 000 entreprises dans le monde, dont BASF, la plus grande entreprise chimique au monde, le plus grand détaillant chinois JD.com, la compagnie aérienne australienne Qantas, ainsi que Caterpillar, FedEx, General Electric et Wal Mart de Mexico. La liste des entreprises ciblées est fortement orientée vers l’Asie et les États-Unis. 48% de toutes les entreprises ciblées sont basées dans la région Asie-Pacifique, suivies de 23% pour les États-Unis. Seulement environ 1 entreprise ciblée sur 10 est européenne, ce qui montre la maturité d’une solide définition des objectifs climatiques dans la région. La demande pour cette campagne est soutenue par de nombreuses institutions financières parmi les plus importantes au monde, notamment Allianz Global Investors, le groupe AXA, le Crédit Agricole, Insight Investment Management, La Banque Postale, Nomura Asset Management, PIMCO, UBS et la Banque européenne d’investissement.
Le groupe comprend également 45 entreprises multinationales avec plus de 710 milliards de dollars de dépenses d’approvisionnement annuelles, telles que PepsiCo, Inc., Astra Zeneca, Yamaha et Schneider Electric, utilisant la campagne pour améliorer la fixation des objectifs d’émissions par leurs fournisseurs et atteindre leurs propres objectifs. La campagne du CDP a augmenté de plus de 30 % depuis l’an dernier, tant en termes de nombre d’organisations de soutien que d’actifs collectés et de pouvoir d’achat.
Les 1 000 entreprises ciblées sont essentielles pour faire aboutir les efforts mondiaux visant à limiter le réchauffement climatique à 1,5°C. Elles sont la source de 7 gigatonnes d’émissions de portée 1 et 2 – l’équivalent de l’Inde et des États-Unis réunis – et ont une valeur marchande combinée de plus de 25 000 milliards de dollars américains.
Une entreprise type avec un objectif réduit ses émissions de 8,8 % par an
Ambroise Fayolle, vice-président de la Banque européenne d’investissement, a déclaré : « Au Groupe Banque européenne d’investissement (EIBG), nous veillons à ce que tous les projets et opérations que nous finançons soient alignés sur les objectifs de l’Accord de Paris. En outre, l’EIBG considère les activités plus larges de ses contreparties, au-delà du projet qui est créé avec le soutien du financement de l’EIBG. Le fait qu’une contrepartie ait ou non un objectif SBTi est un indicateur utile de ses ambitions climatiques. Cela nous aide à les aider à décarboner davantage leurs activités et à renforcer leur résilience face au changement climatique ».
De son côté, Laurent Babikian, Joint Global Director Capital Markets chez CDP, a déclaré : « Les derniers mois de conditions météorologiques extrêmes nous ont de nouveau montré ce que fait un monde qui se réchauffe à 1,2 degré. La situation s’aggravera de manière catastrophique à moins que nous ne constations une réduction sans précédent des émissions de GES – 50 % au cours des huit prochaines années – pour nous permettre de limiter la hausse à 1,5 degré. Mais cela est tout simplement irréalisable à moins que les entreprises les plus impactantes n’aient des objectifs ambitieux de réduction de toutes les émissions de leur chaîne de valeur. Je suis heureux que les institutions financières et les grands acheteurs mondiaux considèrent désormais les SBT comme essentiels pour toutes les entreprises, et nécessaires pour qu’elles atteignent leurs propres ambitions de zéro net. Les SBT sont l’évaluation la plus précise de l’impact total des émissions d’une entreprise sur le marché. Sans eux, les entreprises ne peuvent tout simplement pas montrer de manière convaincante aux investisseurs et aux clients qu’elles sont en transition ».
À l’échelle mondiale, plus de 3 500 entreprises représentant plus d’un tiers de la capitalisation boursière mondiale font déjà partie du SBTi. Parmi ceux-ci, plus de 1 200 ont approuvé des objectifs de 1,5 °C. Les données de SBTi montrent qu’une entreprise type avec un objectif réduit ses émissions de 8,8 % par an, soit au-dessus des 4,2 % requis pour s’aligner sur une trajectoire de 1,5 °C.
Qu’est-ce que la Science-based Target Initiative (SBTi) ?
Initiée en juin 2015, la Science-based Targets Initiative (SBTi) est un projet né de la collaboration entre plusieurs institutions :
- le Carbon Disclosure Project (CDP), qui recueille et communique publiquement les émissions de GES des entreprises ;
- le Global Compact des Nations Unies (UNGC), qui propose aux entreprises un cadre d’engagement, articulé autour de 10 principes fondamentaux de développement durable (économique, social et environnemental) ;
- le World Ressource Institute (WRI), un organisme de recherche sur les questions économiques et environnementales en entreprise ;
Le premier des objectifs de la Science-based Target Initiative (SBTi) est de répondre aux objectifs fixés par la COP21. Dans ce contexte, les institutions réunies sous son égide travaillent à développer diverses méthodes en vue de limiter notre empreinte carbone, et plus particulièrement celle des entreprises. Concrètement, les entreprises rejoignant la SBTi s’engagent à définir des objectifs de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre (GES), conformément aux préconisations scientifiques dressées à l’issue de la COP21. En bref, la SBTi est une approche collective visant à accompagner les entreprises dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) responsables du dérèglement climatique.
Ambroise Fayolle, vice-président de la Banque européenne d’investissement