Neutralité carbone : accélérons la transition énergétique. Tribune de Sylvie Perrin, présidente de la « Plateforme Verte ».
« Notre pays peut-il se satisfaire de l’origine principalement nucléaire de son électricité décarbonée ? Non, car nous savons aujourd’hui qu’il est possible de faire mieux et moins risqué tout en décarbonant, avec les énergies renouvelables. Dans la perspective de 2050 et de l’objectif de neutralité carbone que nous nous sommes fixés, nous devrions être en mesure de nous engager dans une transition écologique beaucoup plus franche.
Nous lançons aujourd’hui le défi de développer en solaire, tous les ans, l’équivalent de 1 000 MW en nucléaire. Et grâce à l’éolien et aux autres énergies renouvelables, donnons-nous comme objectif de doubler cette production pour permettre une transition qui fait sens, à un rythme enfin satisfaisant.
Au cœur de la crise ukrainienne qui a révélé notre trop grande dépendance énergétique, la production d’énergies renouvelables locales fait plus que jamais sens. C’est pourquoi nous demandons que les barrières à l’entrée (nombreuses) pour le déploiement des projets « verts » soient levées, en mettant en place un contrôle a posteriori (et non plus a priori). Car que pèse la perception esthétique des éoliennes face à des enjeux climatiques vitaux ?
Alors que les Français voient leur facture d’électricité augmenter inexorablement depuis 10 ans, l’éolien et le photovoltaïque ont prouvé leur capacité à amortir fortement cette inflation. Ainsi, alors que l’électricité produite par la nouvelle centrale nucléaire de Flamanville (EPR) devrait coûter entre 110 et 120 euros le MWh (selon la Cour des Comptes), les derniers appels d’offres en France assurent un prix d’achat (et non un coût de production) de l’électricité de l’éolien terrestre à 60 euros par mégawattheure, à 57 euros pour le photovoltaïque au sol, et à 44 euros le MWh pour l'éolien en mer (parc de Dunkerque).
A l’heure où la réindustrialisation de la France est un objectif partagé et poursuivi par une majorité de décideurs politiques, nous pouvons nous appuyer sur une filière d’énergies renouvelables solide avec des acteurs créatifs, dynamiques et résilients. Représentant près de 20 % de la consommation finale brute d'énergie en France en 2020, ils sont à l’origine de 8,6 milliards d’euros d'investissement et de 68 000 emplois en équivalent temps plein.
DEVISE NATIONALE
Plus largement, la Plateforme Verte propose de reconsidérer, à l’aune des nouveaux enjeux mondiaux, notre devise nationale, afin que la « fraternité » reflète notre engagement vis-à-vis des générations futures de leur laisser une planète propre. Nous appelons également à élever cet engagement à un rang régalien, en inscrivant la transition écologique au sein de notre Constitution.
Le choix de la transition énergétique, engagé en douceur il y a 20 ans, doit être sans regret et devenir incontournable, rapide et impérative pour atteindre les objectifs que nous nous sommes engagés avec d’autres nations à tenir. Il est à regretter que nous ne soyons pas aujourd’hui en mesure de respecter la trajectoire de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) et que l’Etat en soit réduit à être condamné pour son inaction climatique.
Nous en appelons à nos futurs dirigeants pour qu’ils mènent une politique à long-terme en matière de préservation environnementale, tout en mesurant que leur propre durée de vie politique est limitée par notre système démocratique. Nous en appelons à leur courage et à leur clairvoyance pour confier ces sujets à des institutions de la société civile avec un rôle supra-étatique. Une véritable convention citoyenne pour le climat pérennisée et aux pouvoirs étendus. »