Le marché de l’autoconsommation est-il enfin prêt à décoller ? Réponses avec Sabrina Tiphaneaux, directrice du pôle Energie aux Echos Etudes.
Où en est l'autoconsommation aujourd'hui en France ?
Le marché français de l’autoconsommation est encore clairement anecdotique. A fin juin, on comptait presque 78 000 installations raccordées au réseau d’Enedis. Ça peut paraître peu quand on sait que les autoconsommateurs se comptent par centaines de milliers en Allemagne. Mais le marché est clairement en train de passer un cap. La puissance photovoltaïque en autoconsommation raccordée a plus que triplé sur les deux dernières années et le rythme des raccordements s’accélère trimestre après trimestre. Ikea ne s’y est d’ailleurs pas trompé. Ce n’est pas un hasard si l’enseigne vient de lancer son offre de panneaux photovoltaïques.
Le marché a donc de beaux jours devant lui ?
Il y a encore quelques freins comme le prix relativement bas de l’électricité qui rend l’équation économique fragile, même s’il ne cesse d’augmenter. D’un autre côté, les coûts d’investissement sont assez élevés. Il faut compter entre 7 500 € et 9 000 € environ pour une installation photovoltaïque de 3 kWc. Mais la donne change très vite. En moins de 5 ans, le prix des panneaux a été divisé par plus de deux. Cette tendance va profiter au segment de l’autoconsommation résidentielle qui est le cœur du marché. D’après nos estimations, le nombre d’installations devrait augmenter de 10 % à 15 % en moyenne chaque année d’ici 2025. En clair, l’objectif de la PPE de 200 000 installations en 2023 devrait être atteint et même dépassé.
Et pour le segment BtoB ?
Pour les installations de forte puissance, le contexte est un peu différent. Ce segment a pâti d’un mode de promotion par appel d’offres qui n’a pas rencontré le succès escompté. Quasiment toutes les sessions ont été sous-souscrites. La CRE a même réduit par deux la puissance attribuée pour les deux dernières tranches. Mais là encore, les choses évoluent. La volonté du gouvernement de relever le plafond de puissance en guichet ouvert à 500 kWc va dans le bon sens. La RE 2020 pourrait aussi avoir un impact positif en favorisant cette solution. Le réveil de ce segment semble d’ailleurs engagé. Par exemple, la puissance raccordée des installations raccordées au réseau de transport a bondi de 283% en 2019. Attention tout de même à prendre ces chiffres avec précaution car les volumes dont on parle sont très faibles. Mais ils traduisent bel et bien une nouvelle dynamique. Si cette tendance se poursuit, l’autoconsommation collective pourrait se développer rapidement pour atteindre une capacité installée de l’ordre de 500 MWc à l’horizon 2025 selon nos estimations. De quoi attirer encore nombre de nouveaux entrants...