Alors que le Conseil d’État demande au gouvernement de démontrer comment il pense atteindre en France l’objectif actuel de -40 % d’émissions de gaz à effet de serre (GES) entre 1990 et 2030, la Commission européenne propose de renforcer les efforts visant à contenir le dérèglement climatique en portant de -40 % à -55 % cet objectif au niveau européen. Un sacré challenge que l’association négaWatt appelle à relever !
L’Association négaWatt publie lundi 30 novembre une analyse de l’écart entre ces deux objectifs au niveau national. Celle-ci montre que la France peut atteindre -55 % grâce à une véritable mise en œuvre du triptyque sobriété/efficacité/renouvelables. L’Association négaWatt appelle donc le gouvernement français à au moins soutenir cet objectif !
L’action climatique doit être renforcée au plus vite
Au niveau français comme européen, l’objectif actuel est de réduire de 40 % le niveau d’émissions de GES en 2030 par rapport à 1990. Cet objectif, aussi contraignant soit-il [2]. Au sein de l’Union Européenne (hors Royaume-Uni) elles ont baissé de 24 %., n’est pas en phase avec celui de neutralité carbone fixé à l’horizon 2050 par la loi énergie-climat de 2019. Il ne l’est pas davantage avec l’Accord de Paris qui vise à contenir le réchauffement global à +2 °C, et autant que possible à 1,5 °C. Rappelons que le dérèglement climatique n’est pas corrélé au niveau d’émission à l’horizon 2050 ou 2100, mais bien au cumul d’émissions depuis le début de l’ère industrielle. Dans ce contexte, l’ambition doit être renforcée au plus vite.
La réduction de la consommation d’énergie, levier prioritaire
L’Association négaWatt propose une analyse de l’écart entre l’objectif actuel et un objectif renforcé, en comparant la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) à un scénario fortement inspiré des scénarios négaWatt et Afterres2050. Cette comparaison met en lumière les différences d’hypothèses entre les exercices, et donc les leviers à activer pour atteindre l’objectif -55 %. Le principal levier, et de loin, est le renforcement de la réduction de la consommation d’énergie. Celui-ci est possible dans tous les secteurs. Il l’est notamment dans les transports, grâce à une plus grande maîtrise des distances parcourues, à un meilleur taux de remplissage des véhicules et à un report modal plus marqué de la route vers les modes actifs et les transports en commun. Il l’est aussi dans les bâtiments en renforçant sérieusement la mise en œuvre de la rénovation thermique et en maîtrisant davantage la consommation des appareils électriques. Enfin, il l’est dans le secteur industriel grâce au développement de l’économie circulaire, permettant de réduire les tonnages produits et consommés, et d’augmenter les taux de recyclage.
Les renouvelables pour parcourir le chemin restant
Combinées entre elles, ces différentes actions permettent de réduire de 126 TWh, soit 10 %, la consommation d’énergie finale projetée en 2030 dans la SNBC, concourant ainsi à la baisse de plus de 200 TWh de consommation d’énergies fossiles à cet horizon de temps. L’augmentation de la production renouvelable, à travers les filières éolienne, photovoltaïque et bioénergies (augmentation de 64 TWh au total) et la réduction des pertes liées à la production d’électricité permettent de parcourir le chemin restant. L’objectif -55 % de GES en 2030 est atteignable par la France ; c’est ce que montre cette analyse. L’heure n’est plus « aux petits pas ». Face à l’urgence climatique, la France doit non seulement soutenir au moins la proposition de la Commission européenne visant à relever l’objectif 2030, mais aussi et surtout mettre en place les mesures qui permettent d’atteindre ces objectifs, pour qu’ils ne restent pas d’éternels vœux pieux. C’est ce que le Conseil d’État vient de rappeler opportunément, alors que les participants à la Convention citoyenne sur le climat s’inquiètent de voir leurs propositions maltraitées, malgré les engagements du Président de la République.