Alors que la Convention citoyenne pour le climat appelle à la généralisation de la participation citoyenne dans les projets d’énergies renouvelables, cette Chronique de la transition énergétique explore cet enjeu de réappropriation de l’énergie par les citoyens franciliens. Depuis 2015 et la COP21, l’Île-de-France connait une vraie dynamique, marquée à la fois par la création de coopératives citoyennes d’énergie renouvelable et par le développement du financement participatif. Réappropriation de l’énergie par les citoyens, vers une mutation de la gouvernance de l’énergie ?
En quelques années les projets participatifs et citoyens se sont multipliés en Île-de-France avec à la fois la naissance d’une quinzaine de collectifs ou coopératives locales et la réalisation de premières installations d’énergie renouvelable (en particulier des centrales solaires sur des toitures de bâtiments municipaux). En parallèle, l’ouverture du financement de projets « classiques » d’énergie renouvelable a permis l’émergence de plusieurs projets participatifs comme récemment, avec succès, l’extension de réseaux de chaleur, la récupération de chaleur fatale et la géothermie. Au-delà de la prise de conscience des citoyens, ce phénomène est encouragé par le développement de politiques de soutien des projets ainsi que la structuration de réseaux régionaux d’accompagnement, notamment Énergie partagée Île-de-France. L’AREC vous propose cette première carte interactive des projets participatifs et citoyens en Île-de-France.
Les projets participatifs et citoyens en Île-de-France à forte connotation photovoltaïque
En Île-de-France, les dynamiques citoyennes trouvent progressivement leur place dans les stratégies des territoires. Les projets participatifs et citoyens qui ont été identifiés dans la cartographie précédente démontrent que la dynamique citoyenne francilienne est encore très récente mais prend de l’ampleur rapidement. Entre 2010 et 2018, 6 projets participatifs ont été initiés dont 4 ouvertures de fonds participatifs en 2018. Plus récemment, en 2019 on compte 5 ouvertures de projets à des financements participatifs et 2 installations photovoltaïques citoyennes et en 2020 ce n’est pas moins de 22 projets citoyens qui sont en cours de développement sur le territoire. La majorité des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ayant réalisé un PCAET ont sur leur territoire un ou plusieurs projets citoyens. Un contexte favorable au développement des énergies renouvelables est essentiel à la dynamique citoyenne, reposant notamment sur le soutien des autorités publiques. Les projets citoyens sont majoritairement tous orientés vers les solutions photovoltaïques. Les projets participatifs, dont l’investissement citoyen est uniquement financier et ne requiert aucune expertise, concernent un plus grand éventail d’énergies renouvelables. Les projets photovoltaïques au sol se multiplient en Île-de-France : 5 centrales solaires sont prévues pour une mise en service à l’horizon 2021. Parmi elles, 3 installations photovoltaïques prévoient d’inclure un financement participatif, les projets d’Annet-sur-Marne (17 MWc), Marcoussis (24 MWc) et Triel-sur-Seine (17 MWc).
Zoom sur la centrale solaire de l’école la Plaine à Cachan avec la coopérative Sud Paris Soleil
La coopérative Sud Paris Soleil se compose de plus 180 adhérents, qui ne comptent ni professionnels de l’énergie ni experts en installations photovoltaïques. Ces membres sont tous bénévoles et ont été formés notamment grâce à Énergie Partagée, motivés par la volonté de mener à bien leurs projets photovoltaïques. Ainsi la coopérative a réalisé son premier projet sur le toit de l’école la Plaine à Cachan, une installation de 600 m² de panneaux photovoltaïques. Une démarche soutenue par les mairies d’Arcueil et de Cachan, qui ont chacune investi des parts dans la coopérative. Ce projet a également bénéficié de subventions de la Région. La coopérative prévoit une production d’environ 100 MWh par an. Une énergie revendue par obligation d’achat à un tarif réglementé à EDF et qui devrait potentiellement par la suite être rachetée par Enercoop, fournisseur d’électricité d’origine renouvelable. Ce projet se poursuit par des actions d’information et de sensibilisation portées par l’association La bouilloire. Les subventions permettent aux citoyens de trouver un modèle économique viable pour leur projet. La Région Île-de-France dans le cadre de sa stratégie énergie climat a financé en 2019 avec un appel à projets Énergie Citoyenne 34 opérations. Cet appel à projet soutient à la fois les études juridiques, économiques et de faisabilité techniques et les investissements relatifs aux projets. La Région soutient également les réseaux et acteurs en place pour déployer des projets citoyens et propose une carte interactive sur les gisements solaires en toiture « Mon Potentiel solaire ». Ces outils viennent compléter et mettre en avant les services et les compétences déployés par les autres acteurs sur le territoire.
Les syndicats d’énergie sont aussi de la partie
En Île-de-France, on assiste depuis plusieurs années à un élargissement du périmètre d’actions de certains acteurs de l’énergie historiques à l’exemple des syndicats d’énergie, traditionnellement délégués à la gestion du réseau de distribution électrique ou gaz. Les syndicats d’énergie proposent différents actions comme des achats groupés d’énergie, un appui sur la maitrise de la demande en énergie et l’écomobilité (électrique, GNV/BioGnV et depuis peu l’hydrogène) ou encore la production d’énergies renouvelables avec des structures dédiées. Le SIPPEREC a créé la SIP’EnR pour développer, financer, réaliser et exploiter des projets d’énergies renouvelables. Le SDESM Seine-et-Marne a créé la SEM Énergies. La Région Île-de-France a créé la SEM Île-de-France Énergies afin d’accompagner la rénovation énergétique des copropriétés et le développement de projets d’énergies renouvelables.
Enfin, d’autres acteurs associés à des missions d’accompagnement œuvrent à faciliter la structuration des projets citoyens et leur inscription dans une dynamique territoriale. La participation des collectivités à une société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) permise depuis 2014, ou aux sociétés anonymes (SA) et sociétés anonymes simplifiées (SAS) depuis 2015 en est un exemple des moyens déployés pour permettre aux acteurs publics d’intervenir au sein des projets. On peut citer également les intercommunalités, qui à travers les Plans Climat Air Energie territoriaux (PCAET) interviennent pour aider à la structuration de projets de territoire relatifs à la transition énergétique, la qualité de l’air et la lutte contre le changement climatique et d’initier un dialogue avec la société civile. À l’échelle locale les Agences Locales de l’Énergie et du Climat (ALEC), en lien avec les collectivités, déploient des actions d’appui à la transition énergétique vis-à-vis des citoyens. D’autres acteurs comme Énergie Partagée a développé un réseau régional pour appuyer le développement de groupes de citoyens locaux. Ce réseau propose des actions d’accompagnement, de mutualisation d’outils et d’études et appuie techniquement et juridiquement la structuration des coopératives et le montage des projets.