En cette semaine de pré-rentrée nous revenons sur quelques événements qui ont marqué l’été. Sans conteste, figure en bonne place la conférence « Place au soleil » organisée au ministère le 28 juin par Sébastien Lecornu, secrétaire d'État à Transition écologique et solidaire.
Nous avons déjà publié l’intervention du ministre que l’on peut retrouver ici. Ce sont ensuite succédé à la tribune, les dirigeants des grands énergéticiens (Engie, EDF et Total), la Secrétaire d’Etat à la défense, le directeur de l’immobilier de la SNCF, les dirigeants de la grande distribution (Leclerc, Système U, Les Mousquetaires, Auchan, Carrefour, Casino. Eric Scotto, PDG d’Akuo Energy est ensuite intervenu pour représenter les PME-ETI.
Nous vous proposons de débuter cette série, par l’intervention d’Isabelle Kocher, directrice générale du Groupe Engie. Nous publierons demain l’intervention de Jean-Bernard Levy, PDG d’EDF.
Virginie Schwarz (Directrice de l’énergie au ministère de la Transition Ecologique et Solidaire): Pour commencer cette soirée d'engagement, je voudrais tout de suite appeler la première de nos grands témoins pour manifester de l'engagement de son groupe en faveur du solaire, Isabelle Kocher directrice générale du groupe Engie que j’invite à venir sur la tribune pour nous expliquer, non seulement tout ce qu'Engie a fait, mais surtout, tout ce qu’Engie va faire pour nous aider à développer le solaire
Isabelle Kocher : Merci Virginie, Madame la Ministre, Monsieur le Ministre, Messieurs et Mesdames les Parlementaires, Mesdames et Messieurs les Elus, Mesdames et Messieurs les Présidents, Chers collègues,
Je pense que si nous sommes réunis ici dans cette salle c'est que nous pensons que le solaire est une énergie d'avenir et je suis heureuse que soit annoncée ce soir toute cette série de mesures qui je pense sont très bien pesées et fort à propos.
Le solaire chez Engie fait l'objet d'efforts importants pour faire décoller, parce que nous en sommes là encore, malgré tout cette filière. Nous sommes le numéro 1 du solaire en France aujourd'hui avec 900 mégawatts en exploitation.
Nous avons pris le parti de mettre en œuvre d'implémenter toutes les technologies que permet cette filière c'est à dire des centrales au sol, des centrales en toiture, des ombrières, mais aussi le solaire à la maison, l'autoconsommation, bref de jouer de toute la palette que permet cette technologie dont je crois qu’une des caractéristiques c’est précisément qu’elle est flexible. C'est pour cela aussi qu'elle a un grand potentiel.
En 2017, un tiers des capacités qui ont été mises en œuvre en France provenait d'une entité de notre groupe Engie, et je vous dis cela simplement pour illustrer le fait que nous nous y sommes vraiment mis, si vous me permettez cette expression.
Je dirais que tout ce que nous observons en France et ailleurs dans la baisse des coûts, nous incite à accélérer encore. Je gardais un chiffre en tête, que je voudrais vous rappeler ce soir : au début des tarifs de rachat d'énergie solaire en France je me souviens - ça m’est resté tellement c'était important - le premier tarif de rachat c'était 700 euros du mégawattheure.
Nous sommes tous un peu ici des spécialistes de l'énergie, je pense qu'on peut dire que 700 €/MWh c'était absolument exorbitant.
Nous en sommes en France aujourd'hui, vous savez comme moi à 70 €, parfois moins parfois plus ça dépend des régions, mais voilà, on a gagné un facteur 10 et tout ceci nous incite à accélérer encore. Nous avons prévu de multiplier par 4 nos capacités installées dans les toutes prochaines années.
Un mot sur nos partis pris, en tant que groupe, pour implémenter cela à grande échelle : D'abord c'est prendre le sujet au sérieux et c'est donc d'organiser une filière industrielle. Une filière industrielle avec des sous-traitants auxquels nous assurons à chaque fois que nous le pouvons des volumes, une filière industrielle avec une « supply chain », qui est organisée, qui est globalisé, qui permet de suivre la course de la baisse des prix avec la volonté forte de ne jamais rentrer dans une logique de prix cassés, de prix qui ne permettent pas de rentabilité et qui donc ne permettrait pas d'innovation. Mais d'être dans une logique économique qui est homogène à celle que nous avons pour l'ensemble des technologies que nous installons.
On prend le sujet au sérieux premièrement, deuxièmement essayer de faire jouer toute la palette des options, j'ai dit tout à l'heure, troisièmement vraiment faire la course au foncier et nous avons commencé à travailler beaucoup en particulier avec les acteurs de la grande distribution, parce qu'il y a là évidemment un gisement important et bien entendu bien d'autres acteurs disposent de foncier. Je me réjouis de ce qui a été annoncé ce soir je crois que c'est vraiment un point, une étape très importante.
Ensuite en investissant dans l'innovation. Vous avez parlé du stockage, il n’y aura pas de solaire massif, intermittent par définition, sans développement du stockage. Stockage sous toutes ses formes évidemment, les batteries bien sûr, mais les batteries ne permettront pas de faire face à l'ensemble des types de stockage et des durées de stockage dont nous avons besoin. Donc multiplier les formes de stockage et essayez là aussi de reproduire la même baisse de coûts que celle que nous avons réussi à faire apparaître sur les technologies de panneaux et d’onduleurs. Donc investir dans l'innovation et puis jouer la carte locale.
Je me réjouis de ce point de vue que Monsieur le Ministre vous ayez, si j'ai bien compris, maintenu les mécanismes d'incitation directe pour les collectivités locales, je crois que c’est absolument fondamental. Il faut créer un intérêt commun pour évidemment fédérer l'ensemble de ces de ses efforts.
Je me réjouis que le gouvernement ait pris ce sujet du solaire vraiment avec vigueur, avec ambition, je pense que la méthode que vous avez mis en place, d'ailleurs auparavant sur d'autres technologies, est la bonne. C’est une méthode participative, je suis admirative du nombre de réunions qui ont eu lieu, de workshops, on m’en a fait un résumé tout à l'heure et je trouve cela très impressionnant.
Nous avons beaucoup promu et soutenu les mesures que vous avez annoncées. La simplification administrative. Je garde en tête, qu'il y a deux ans nous avions un délai d'instruction de 10 mois il est passé ces derniers temps à 18 mois. Il faut arriver à le ramener à 10 mois maximum. Je pense que c’est accessible avec ce que vous avez annoncé ce soir. Il y a un enjeu de vitesse dans la mise en œuvre cette technologie, c'est absolument évident.
Le foncier, nous en avons parlé, et je pense qu'en effet la libération du foncier public est évidemment un levier qui est très important.
L'adaptation du cadre juridique à l'ensemble des applications qui sont très diverses et puis la démocratisation de l'autoconsommation et je me réjouis là aussi du fait que vous ayez étendu les dispositifs de soutien à l'autoconsommation collective, qui est là dans le paysage résidentiel français, et qui est un moyen de démultiplier évidemment les cas d'application.
C'est une très belle première étape, elle permet d'aborder la suite, la suite c'est notamment une PPE, qui va donc être préparée pour la fin de l'année et je sais que les travaux sont très intenses dans ce domaine. La PPE moi ce que j'en attends c'est qu'elle donne de l'ambition au développement de cette filière et qu'elle donne de la visibilité. Parce que pour organiser les filières industrielles, pour investir dans l'innovation, pour structurer tout cela, il faut de la visibilité. Je crois que c'est la prochaine étape sur laquelle vous travaillez et à titre personnel je voudrais vous en remercier.
Je n'ai pas être plus long que cela j'aurais peut-être simplement à rappeler un petit peu l'équation mondiale. Au fond, nous avons la chance, comme beaucoup d'entre vous, d'être présent dans beaucoup de pays, le solaire à l'évidence sera une partie importante du mix énergétique futur, du cocktail énergétique si je puis dire.
Les spécialistes nous disent que si on faisait vraiment valoir la totalité du potentiel solaire mondial il couvrirait 20 fois les besoins en énergie mondiale. Je pense que c'est un calcul théorique mais qui donne bien, quand même, l'ordre de grandeur. Le solaire est un gisement pratiquement inépuisable. Il ne pourra pas faire face à l'ensemble des besoins, bien entendu, moi je crois en un mix des énergies, mais il jouera un rôle important.
C'est donc un gisement important, il y en a partout dans le monde, pas exactement dans les mêmes proportions, nous sommes bien d'accord, mais par définition il y en a partout et on voit qu'en France, qui n'est pourtant pas l'un des pays les plus ensoleillées du monde, on arrive à faire baisser les coûts du solaire à des coûts raisonnables. Donc il y en a beaucoup, il est réparti, il est flexible, je pense que c’est celle des technologies renouvelables qui est la plus flexible dans son emploi, puisqu'on peut le mettre en œuvre dans le cadre de très grandes centrales, mais aussi à de petites échelles et c'est la raison pour laquelle le solaire de toiture se développe si bien. Tout cela fait que c'est une énergie intéressante et qu'elle viendra probablement représenter une partie importante du cocktail à côté du gaz, à côté de l'hydrogène, à côté d'un certain nombre de technologies qui vont permettre d'aller progressivement vers un monde sans carbone.
Merci pour cette première étape qui vient donc d'être franchie, qui, je pense, permet à l'ensemble des acteurs de finalement réhausser les ambitions que nous pouvons avoir et je vous donne tous rendez-vous pour les prochains mois et notamment moi j'attends avec beaucoup d'impatience ce qui va être décidé dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE). Merci beaucoup.