Il n’aura pas fallu attendre le vote d’une loi spécifique pour augmenter le périmètre des projets en autoconsommation collective (ACC). Le Sénat a, en effet, adopté, jeudi dernier, en première lecture, un amendement à la loi ELAN, qui renvoie la détermination du périmètre de l’ACC à un arrêté.
Cette disposition qui fait partie des décisions annoncées par le ministre Sébastien Lecornu fin juin, à la suite du groupe de travail sur le solaire, n’a pas pour autant été adoptée dans la facilité. Dans un premier temps la commission économique a rejeté l’amendement qui a été à nouveau examiné en séance publique. La commission a maintenu son avis « défavorable », tandis que le gouvernement le soutenait. Finalement, soumis au vote des sénateurs, l’amendement a été adopté.
Cet épisode, démontre une fois encore, que malgré le consensus dégagé par le groupe de travail et suivi des arbitrages politiques du gouvernement, des résistances subsistent. Comme si l’ancien monde n’arrivait pas à percevoir les tendances de notre société et particulièrement celles du secteur de l’énergie, bousculées par la transformation digitale.
Il est urgent que toutes les parties prenantes se mettent en mode « agile » si nous ne voulons pas que les encéphalogrammes de nos réseaux intelligents ne demeurent désespérément plats !
Nous reproduisons ci-dessous les échanges en commission et en séance publique
Débat en Commission économique
Articles additionnels après l'article 21
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. - L'amendement n° 883 renvoie au pouvoir réglementaire le soin de fixer le périmètre - actuellement précisé par la loi - des opérations d'autoconsommation collective. C'est notre commission qui est à l'origine de cette disposition, qui a été votée dans la loi de février 2017 sur l'autoconsommation. Contrairement à ce qu'indiquent les auteurs de l'amendement, ce périmètre n'est pas limité à l'échelle d'un bâtiment mais à celle d'un même poste de transformation de moyenne en basse tension, ce qui permet déjà des échanges d'énergie, entre plusieurs bâtiments, à finalité éventuellement différente - résidentielle ou tertiaire. Nous avions jugé qu'il n'était pas prudent d'aller au-delà. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 883.
Débat en séance publique
Articles additionnels après l'article 21
le président. L'amendement n° 883, présenté par M. D. Dubois, Mme Létard et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 21
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase de l'article L. 315-2 du code de l'énergie, les mots : « en aval d'un même poste public de transformation d'électricité de moyenne en basse tension » sont remplacés par les mots : « dans un périmètre fixé par arrêté ».
La parole est à M. Michel Canevet.
Michel Canevet. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a modifié le code de l'énergie afin de soutenir l'autoconsommation d'électricité.
Le développement de l'autoconsommation d'électricité collective est devenu une priorité. Il doit être facilité, afin de répondre aux enjeux de la transition énergétique et de la lutte contre la précarité énergétique. En effet, l'autoconsommation d'électricité contribue à développer la production d'électricité à partir d'énergies renouvelables et permet de maîtriser, voire de réduire, les factures d'énergie des ménages.
Les organismes d'HLM se sont fortement engagés dans la mise en œuvre d'opérations d'autoconsommation collective, en liaison avec le ministère de la transition énergétique. Le groupe Union Centriste soutient ces démarches qui visent à accroître le taux de consommation locale, à améliorer l'équilibre économique des opérations et à tenir compte des réflexions en cours au sein du groupe de travail sur l'énergie solaire.
Cet amendement vise à renvoyer à un arrêté la définition du périmètre d'une opération d'autoconsommation collective.
le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Le périmètre actuel des opérations d'autoconsommation collective permet déjà des échanges d'énergie entre plusieurs bâtiments, à finalités éventuellement différentes, dans le résidentiel ou dans le tertiaire. Il nous a semblé qu'il ne serait pas prudent d'aller au-delà, en particulier parce que les effets de l'autoconsommation collective sur les réseaux sont encore largement méconnus.
J'ajoute que le législateur, en renvoyant à un arrêté, comme il est proposé, renoncerait à tout pouvoir en la matière, ce qui n'est pas souhaitable.
Je sollicite donc le retrait de l'amendement. J'y serai défavorable s'il est maintenu.
le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Julien Denormandie, secrétaire d'État. Si j'ai bien compris – la question est très technique –, la législation actuelle permet un raccordement à un même poste, et M. Canevet propose d'étendre la possibilité d'un raccordement à plusieurs postes, parce que, dans certaines opérations d'urbanisme, on peut avoir plusieurs postes. (M. Michel Canevet acquiesce.) Cette mesure me paraît de bon sens. Avis favorable.
le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Au moment de l'élaboration du dispositif sur l'autoconsommation d'électricité, nous n'avons pas voulu aller jusqu'à ce que propose notre collègue. Par cohérence, nous maintenons notre position.
le président. Je mets aux voix l'amendement n° 883.
(L'amendement est adopté.)
le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 21.