Sous ce titre « la fabrique écologique » produit une première note d’analyse du projet de loi sur la transition énergétique. Ce groupe de travail est co-présidé par Géraud Guibert (Président de La Fabrique Ecologique, Conseiller maître à la Cour des Comptes) et Arnaud Gossement (photo) (membre du Conseil d’orientation de La Fabrique Ecologique, avocat au Barreau de Paris, docteur en droit et enseignant à l’Université Paris I)
On trouve parmi les signataires : Guillaume Bougeard (cadre supérieur au sein d'une entreprise de transport public), Sébastien Delpont (Directeur Associé, BeCitizen - Groupe Greenflex), Johann Margulies (en charge de la politique énergie-climat de la Ville de Sevran (93) et enseignant à Sciences Po Paris), Corentin Sivy (membre du groupe d'expert du débat sur la transition énergétique), Julien Lupion (rapporteur du groupe de travail) et Cédric Philibert (analyste à la division des énergies renouvelables à l’Agence Internationale de l’Energie)
Voici la synthèse du document qu’il est possible de télécharger en bas de note.
Sur la méthode
L’avant-projet de loi offre une bonne base de travail aux parlementaires et autorise une discussion riche et de qualité.
Son contenu reflète cependant d’une méthode d’élaboration « en tuyau d’orgue » plutôt que réellement interministérielle. Ceci explique sans doute que des sujets majeurs comme l’agriculture ou l’aménagement urbain n’y sont pas traités. Il procède trop souvent à des renvois aux ordonnances ou aux décrets sur des points pourtant majeurs.
Le texte se fonde sur une approche carbo-centrée et électro-centrée, principalement consacrée à la seule question, certes essentielle mais pas unique, de la production. Il propose une adaptation plus qu’une véritable transition du droit de l’énergie. L’étude d’impact est parfois trop imprécise, s’agissant notamment de la solidité juridique de certaines mesures dont celle de réduction de la part du nucléaire.
Sur les objectifs du nouveau modèle énergétique
Ceux-ci sont ambitieux et mobilisateurs, en particulier pour la réduction de la consommation finale d’énergie, de la consommation d’énergie fossile et le développement de la part des énergies renouvelables.
Le texte actuel fait disparaître l’objectif d’un « facteur 4 à 5 » en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour les pays développés de 2005 à 2050, ce qui est indispensable à corriger. Des objectifs intermédiaires harmonisés à 2030 seraient bienvenus notamment pour la réduction de la consommation finale d’énergie.
Sur la gouvernance
L’avant-projet de loi propose une méthode sur la stratégie bas carbone et la programmation pluriannuelle de l’énergie qui a le mérite de la cohérence et de la continuité dans le temps. Il peut contribuer à dépassionner le débat sur la réduction de la part du nucléaire et ainsi le faire avancer.
Comportant pour l’essentiel des mesures portant sur les compétences et les attributions des collectivités territoriales, il confirme le choix de décentralisation énergétique, ce qui est positif. Mais il ne va pas suffisamment loin pour que cette logique soit pleinement cohérente : pour les exercices de planification nationaux, c’est toujours un dispositif « du haut vers le bas » qui prédomine ; le rôle des régions et les outils à leur disposition ne sont pas clarifiés ; la nécessaire coordination entre les intercommunalités, nouvelles autorités organisatrices de l’énergie (AOE) et les autorités de la distribution de l’énergie n’est pas traitée.
Le texte pourrait donner davantage de garantie pour une transition énergétique transparente et partagée : le parlement est très peu associé à l’élaboration et à la révision des nouveaux documents de planification ; les multiples, et sans doute trop nombreux, nouveaux comités ne sont pas articulés avec le Conseil national de la transition écologique (CNTE).
Sur le mix énergétique et les usages
Les transports et qualité de l’air : l’avant-projet de loi propose de renforcer le volet « pollution atmosphérique » dans tous les instruments de planification environnementale. La pérennisation des zones de circulation restreinte peut constituer un levier efficace. Les mesures sur la voiture électrique, intéressantes, ne suffisent pas à une véritable politique de mobilité durable.
Les bâtiments : plusieurs mesures vont dans le bon sens pour faciliter les travaux d’efficacité énergétique (règles d'urbanisme moins bloquantes, vote simplifié dans les copropriétés,…). L’obligation d’isolation lors de certains travaux est utile, elle se révèlera très puissante ou illusoire selon les précisions réglementaires.
D’autres points restent à arbitrer. La question de l’agrément bancaire des sociétés de tiers financement doit être tranchée. La précarité énergétique n’est toujours pas reconnue au nombre des critères de l’habitat indigne.
Le chèque énergie, qu’il faudrait mieux rebaptiser « chèque chauffage », ne doit pas être l’occasion de faire subventionner le chauffage au fuel, mais plutôt d’inciter à la reconversion des installations de ce type.
Les énergies renouvelables : le texte propose surtout des mesures de contrôle et d’adaptation, favorisant certainement leur acceptabilité à moyen terme (sociale, technique…) mais pas leur développement aujourd’hui très ralenti. Il souffre d’un manque de mesures de simplification, sauf pour les énergies marines, y compris s’il doit être lu en correspondance avec le projet de loi de simplification de la vie des entreprises.
L’économie circulaire : la définition de la valeur juridique de cet objectif demeure confuse. Pour l’heure, l’avant-projet de loi limite cette notion à des mesures relatives à la gestion des déchets. 2
Cette note est issue des travaux d’un groupe de réflexion réuni dans le cadre de La Fabrique Ecologique en juillet 2014. Il s’agit d’une version intermédiaire d’une note dont la version finale ne sera publiée que début 2015, elle a fait l’objet, conformément aux règles de La Fabrique Ecologique, d’une validation allégée. La version finale sera en revanche soumise à la procédure de validation habituelle.
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