Par un communiqué, le ministère du développement durable et Bercy ont annoncé lundi 23 août en soirée une baisse de 12% de l'ensemble des tarifs d'achat du photovoltaïque au 1er septembre 2010. Cette mesure fait suite aux conclusions du rapport Charpin de l'Inspection Générale des Finances (IGF). Si elle était attendue par les professionnels, elle choque cependant par sa brutalité et par l'absence de négociations. Un cas typique de passage en force en pleine période estivale ! Réactions.
La pilule est dure à avaler. La baisse de 12% des tarifs d'achat du photovoltaïque avec application au 1er septembre a fait l'effet d'une douche froide auprès des acteurs de la filière. Pour légitimer cette mesure, le gouvernement s'appuie sur le rapport Charpin de l'IGF que s'est procuré le Figaro. Ce rapport stipule que « la rentabilité du secteur photovoltaïque est devenue très attractive avec la baisse des coûts de production des panneaux (développement des capacités de production dans les pays d'Asie) et un effondrement des prix liés à la crise espagnole». Le document rappelle que «l'écart entre le tarif d'achat (entre 414 et 580 euros par mégawatt/heure) et le prix du marché (56 euros par MWheure) est financé par les consommateurs d'électricité via la contribution au service public de l'électricité (CSPE). Nous avons chiffré à environ 60 euros par an pour un ménage se chauffant à l'électricité les charges supplémentaires qui pourraient être répercutées sur la facture des consommateurs (soit 1,5 milliards d'euros par an dès 2012), si rien n'était fait ». Le pouvoir d'achat en toile de fond !
Un nouveau coup de butoir scandaleux
« Ce rapport a été commandité pour crédibiliser la notion de bulle spéculative. Tout cela est un faux prétexte. Je trouve en effet l'argument spéculatif particulièrement spécieux dans cette affaire surtout quand on voit le niveau des subventions allouées au nucléaire depuis quarante ans dans ce pays. C'est un fait, les lobbys ont bien fonctionné » vilipende amèrement l'avocate spécialisée dans les énergies renouvelables Ariane Vennin qui a dénombré pas moins de six arrêtés publiés lors des huit derniers mois concernant les tarifs d'achat. « Ils font de la com. Le problème est que ces revirements permanents laissent la filière décomposée et dénotent une absence de choix clairs, de visibilité à long terme. Ce nouveau coup de butoir supplémentaire m'apparaît comme scandaleux et risque de mettre à mal cette filière naissante » poursuit-elle vindicative.
Francis Hildenbrand, porte parole du SYNAIP (Syndicat National des Installateurs Photovoltaïques) s'agace lui aussi du cynisme du gouvernement sur ce dossier. « Voilà qu'on nous refait le coup de la spéculation. Avec une telle propagande, les PME du photovoltaïque que nous représentons vont avoir du mal à se faire entendre du grand public. Et pendant ce temps, certains continuent à s'en mettre plein les poches». Pour le SYNAIP, ce nouveau projet d'arrêté est une prime au développement des grosses centrales au sol portées par les grands groupes. « Cet arrêté tue l'intégration en toiture » assure péremptoire Francis Hildenbrand.
Le secteur des toitures en grandes difficultés
Sans être aussi excessif, Thierry Lepercq, PDG de Solaire Direct note tout de même que le secteur des toitures photovoltaïques non agricoles, hors particuliers s'entend, se trouve déjà en grandes difficultés. « Ce domaine d'activités a déjà été affecté par le passage des 60 à 42 centimes d'euros le kWh. Avec -12% supplémentaire, de nombreux projets vont devenir non économiques notamment dans le nord de la France. Il y a là d'ailleurs quelque chose de paradoxal. La France a ciblé le développement du solaire photovoltaïque sur les toitures et voilà que maintenant le consensus est bizarrement remis en cause. Quid des toitures sur les lycées par exemple. Je comprends les réactions d'incompréhension, de désespoir.».
Richard Loyen, secrétaire général du syndicat des professionnels du solaire Enerplan, confirme cet état de fait. « La première révision de tarifs en janvier dernier avait déjà provoqué un recul de 10 % des demandes de raccordement au premier trimestre et de 30 % au cours du deuxième ». Que va-t-il se passer demain avec ce nouvel ajustement de 12% qui porte la baisse cumulée depuis le début de l'année à 42% tout de même ?
Le besoin d'une vision de long terme
Par ailleurs, Thierry Lepercq juge surprenant la sortie brutale de cet arrêté notamment dans son côté non concerté. « Il s'agit là d'un chiffre imposé avec application dans les huit jours. Sur le plan des bonnes pratiques, on a vu mieux. Sur la forme, c'est regrettable. Nous payons les pots cassés de la gestion de la crise de la fin de l'année dernière. Le fil de la confiance a été remis en cause » admet-il.
Bruno Gaiddon, responsable des activités photovoltaïque de l'association Hespul évoque pour sa part une gestion dans l'urgence sans vision stratégique, une mesure de pompier sans concertation. « Voilà en tous les cas un nouveau signal négatif pur la filière. On ne sera jamais sûr de rien, tout peut-être remis en question du jour au lendemain. Nos avons besoin d'une vision de long terme ». Sur le seuil des 500 MW par an évoqué dans le communiqué, Bruno Gaiddon ne comprend pas que le gouvernement veuille volontairement brider ce marché à fort potentiel de croissance et de création d'emplois. »J'y vois une erreur fondamentale de raisonnement. Graver dans le marbre d'un arrêté une croissance zéro pendant dix ans sur un secteur en plein boom est une ineptie. Et puis quel opérateur sera dans les 500 MW, et lequel n'y sera pas ? » questionne-t-il.
L'Allemagne réalise 500 MW en trois semaines
Thierry Lepercq échafaude pour sa part deux conjectures autour de cette notion de seuil des 500 MW. « Soit le gouvernement s'y tient et la France reste dans les clous fort peu ambitieux du Grenelle. 500 MW sur neuf ans plus les 1000 MW déjà réalisés, on est dans l'objectif des 5,5 GW. 500 MW, cela représente 5% du marché mondial. Il s'agit du marché belge. Vous rendez vous compte que l'Allemagne fait aujourd'hui les 500 MW en trois semaines. Si c'est cela, la France demeurera un pays sans solaire, sans filière » assène-t-il. Et Thierry Lepercq de faire resurgir les puissants lobbys de l'énergie nucléaire qui refuse de voir un destin solaire pour la France. « J'ai une certitude. Le Grenelle a été conçu pour deux raisons : conquérir l'électorat vert et faire accepter le déploiement de l'EPR dans le pays. Aujourd'hui, le Grenelle est supplanté par la rigueur budgétaire ».
La deuxième hypothèse est plus optimiste. Thierry Leperqc voit dans cette imposition d'un seul à 500 MW une manière brutale d'enclencher une négociation avec le gouvernement. « Nous ne sommes pas face à un mur d'incompréhension, la porte des discussions n'est pas fermée. Nous devons nous mettre autour d'une table et évoquer sans tabou les volumes, les prix, les contreparties dans une logique de donnant-donnant. Le chiffre de convergence de 1000 MW qui circule dans les cercles initiés représente le seuil minimal pour poser les bases d'une industrie en France. Et le gouvernement a besoin de cette industrie et ces emplois induits, 10 000 aujourd'hui, bientôt peut-être 30 000. Il serait dommage pour la France de passer à côté » confirme le PDG de Solaire Direct. Christine Lagarde, ministre des finances semble d'ailleurs plébisciter cette négociation : «Cette évolution tarifaire est la première étape d'une adaptation nécessaire du système de régulation des tarifs de rachat, Cette évolution, qui doit garantir à la filière des perspectives solides et durables de développement jusqu'en 2020, sera préparée à l'automne en concertation avec l'ensemble des acteurs du secteur», conclut-on à Bercy. Dont acte !
La pilule est dure à avaler. La baisse de 12% des tarifs d'achat du photovoltaïque avec application au 1er septembre a fait l'effet d'une douche froide auprès des acteurs de la filière. Pour légitimer cette mesure, le gouvernement s'appuie sur le rapport Charpin de l'IGF que s'est procuré le Figaro. Ce rapport stipule que « la rentabilité du secteur photovoltaïque est devenue très attractive avec la baisse des coûts de production des panneaux (développement des capacités de production dans les pays d'Asie) et un effondrement des prix liés à la crise espagnole». Le document rappelle que «l'écart entre le tarif d'achat (entre 414 et 580 euros par mégawatt/heure) et le prix du marché (56 euros par MWheure) est financé par les consommateurs d'électricité via la contribution au service public de l'électricité (CSPE). Nous avons chiffré à environ 60 euros par an pour un ménage se chauffant à l'électricité les charges supplémentaires qui pourraient être répercutées sur la facture des consommateurs (soit 1,5 milliards d'euros par an dès 2012), si rien n'était fait ». Le pouvoir d'achat en toile de fond !
Un nouveau coup de butoir scandaleux
« Ce rapport a été commandité pour crédibiliser la notion de bulle spéculative. Tout cela est un faux prétexte. Je trouve en effet l'argument spéculatif particulièrement spécieux dans cette affaire surtout quand on voit le niveau des subventions allouées au nucléaire depuis quarante ans dans ce pays. C'est un fait, les lobbys ont bien fonctionné » vilipende amèrement l'avocate spécialisée dans les énergies renouvelables Ariane Vennin qui a dénombré pas moins de six arrêtés publiés lors des huit derniers mois concernant les tarifs d'achat. « Ils font de la com. Le problème est que ces revirements permanents laissent la filière décomposée et dénotent une absence de choix clairs, de visibilité à long terme. Ce nouveau coup de butoir supplémentaire m'apparaît comme scandaleux et risque de mettre à mal cette filière naissante » poursuit-elle vindicative.
Francis Hildenbrand, porte parole du SYNAIP (Syndicat National des Installateurs Photovoltaïques) s'agace lui aussi du cynisme du gouvernement sur ce dossier. « Voilà qu'on nous refait le coup de la spéculation. Avec une telle propagande, les PME du photovoltaïque que nous représentons vont avoir du mal à se faire entendre du grand public. Et pendant ce temps, certains continuent à s'en mettre plein les poches». Pour le SYNAIP, ce nouveau projet d'arrêté est une prime au développement des grosses centrales au sol portées par les grands groupes. « Cet arrêté tue l'intégration en toiture » assure péremptoire Francis Hildenbrand.
Le secteur des toitures en grandes difficultés
Sans être aussi excessif, Thierry Lepercq, PDG de Solaire Direct note tout de même que le secteur des toitures photovoltaïques non agricoles, hors particuliers s'entend, se trouve déjà en grandes difficultés. « Ce domaine d'activités a déjà été affecté par le passage des 60 à 42 centimes d'euros le kWh. Avec -12% supplémentaire, de nombreux projets vont devenir non économiques notamment dans le nord de la France. Il y a là d'ailleurs quelque chose de paradoxal. La France a ciblé le développement du solaire photovoltaïque sur les toitures et voilà que maintenant le consensus est bizarrement remis en cause. Quid des toitures sur les lycées par exemple. Je comprends les réactions d'incompréhension, de désespoir.».
Richard Loyen, secrétaire général du syndicat des professionnels du solaire Enerplan, confirme cet état de fait. « La première révision de tarifs en janvier dernier avait déjà provoqué un recul de 10 % des demandes de raccordement au premier trimestre et de 30 % au cours du deuxième ». Que va-t-il se passer demain avec ce nouvel ajustement de 12% qui porte la baisse cumulée depuis le début de l'année à 42% tout de même ?
Le besoin d'une vision de long terme
Par ailleurs, Thierry Lepercq juge surprenant la sortie brutale de cet arrêté notamment dans son côté non concerté. « Il s'agit là d'un chiffre imposé avec application dans les huit jours. Sur le plan des bonnes pratiques, on a vu mieux. Sur la forme, c'est regrettable. Nous payons les pots cassés de la gestion de la crise de la fin de l'année dernière. Le fil de la confiance a été remis en cause » admet-il.
Bruno Gaiddon, responsable des activités photovoltaïque de l'association Hespul évoque pour sa part une gestion dans l'urgence sans vision stratégique, une mesure de pompier sans concertation. « Voilà en tous les cas un nouveau signal négatif pur la filière. On ne sera jamais sûr de rien, tout peut-être remis en question du jour au lendemain. Nos avons besoin d'une vision de long terme ». Sur le seuil des 500 MW par an évoqué dans le communiqué, Bruno Gaiddon ne comprend pas que le gouvernement veuille volontairement brider ce marché à fort potentiel de croissance et de création d'emplois. »J'y vois une erreur fondamentale de raisonnement. Graver dans le marbre d'un arrêté une croissance zéro pendant dix ans sur un secteur en plein boom est une ineptie. Et puis quel opérateur sera dans les 500 MW, et lequel n'y sera pas ? » questionne-t-il.
L'Allemagne réalise 500 MW en trois semaines
Thierry Lepercq échafaude pour sa part deux conjectures autour de cette notion de seuil des 500 MW. « Soit le gouvernement s'y tient et la France reste dans les clous fort peu ambitieux du Grenelle. 500 MW sur neuf ans plus les 1000 MW déjà réalisés, on est dans l'objectif des 5,5 GW. 500 MW, cela représente 5% du marché mondial. Il s'agit du marché belge. Vous rendez vous compte que l'Allemagne fait aujourd'hui les 500 MW en trois semaines. Si c'est cela, la France demeurera un pays sans solaire, sans filière » assène-t-il. Et Thierry Lepercq de faire resurgir les puissants lobbys de l'énergie nucléaire qui refuse de voir un destin solaire pour la France. « J'ai une certitude. Le Grenelle a été conçu pour deux raisons : conquérir l'électorat vert et faire accepter le déploiement de l'EPR dans le pays. Aujourd'hui, le Grenelle est supplanté par la rigueur budgétaire ».
La deuxième hypothèse est plus optimiste. Thierry Leperqc voit dans cette imposition d'un seul à 500 MW une manière brutale d'enclencher une négociation avec le gouvernement. « Nous ne sommes pas face à un mur d'incompréhension, la porte des discussions n'est pas fermée. Nous devons nous mettre autour d'une table et évoquer sans tabou les volumes, les prix, les contreparties dans une logique de donnant-donnant. Le chiffre de convergence de 1000 MW qui circule dans les cercles initiés représente le seuil minimal pour poser les bases d'une industrie en France. Et le gouvernement a besoin de cette industrie et ces emplois induits, 10 000 aujourd'hui, bientôt peut-être 30 000. Il serait dommage pour la France de passer à côté » confirme le PDG de Solaire Direct. Christine Lagarde, ministre des finances semble d'ailleurs plébisciter cette négociation : «Cette évolution tarifaire est la première étape d'une adaptation nécessaire du système de régulation des tarifs de rachat, Cette évolution, qui doit garantir à la filière des perspectives solides et durables de développement jusqu'en 2020, sera préparée à l'automne en concertation avec l'ensemble des acteurs du secteur», conclut-on à Bercy. Dont acte !