Pour l'association Enerplan des professionnels du solaire, si le principe de la baisse avait déjà été intégré dans les propositions de la profession, celle-ci regrette que la complexité administrative s'intensifie. Plus qu'un coût à la charge de la filière, cela est source d'incertitudes pour les PME et PMI du secteur. L'été est propice à ne faire durer que 8 mois ce qui devait perdurer jusqu'à 2012. Alors que le prix des modules photovoltaïques et accessoires est globalement stable avec des tendances haussières depuis début 2010, où étaient sortis les nouveaux tarifs d'achat de l'électricité solaire. Que la dynamique de nouvelles demandes de raccordement s'essouffle (moins 10% au 1er trimestre 2010, moins 30% au cours du 2nd trimestre). Le gouvernement vient d'annoncer par voie de presse pour le 1er septembre 2010 une baisse de 12% pour tous les tarifs, à l'exception du résidentiel inférieur à 3 kW intégré au bâti.
Le cadenas des contraintes administratives
« Les professionnels du solaire ne sont pas hostiles par principe à une baisse des tarifs, qui était souhaitée par le secteur pour mieux réguler le développement du marché, ils n'ont pas été entendus sur les principales contreparties demandées : simplification administrative et introduction d'un coefficient d'insolation pour pondérer les tarifs de l'intégré au bâti. Le cadenas des contraintes administratives n'a pas encore été déverrouillé pour fluidifier le marché, alors que cela représente une charge lourde pour le secteur » déplore Richard Loyen, le secrétaire général d'Enerplan. Au contraire, en effet, le Comité d'Evaluation de l'Intégration au Bâti (CEIAB), a introduit la notion d'épaisseur dans la définition du plan de toiture, pour bénéficier du tarif intégré au bâti. Cette condition supplétive non prévue directement dans l'arrêté tarifaire, introduit un aléa sur le régime du tarif applicable en 2011(58 ou 37 c€/kWh) en fonction de prescriptions locales d'urbanisme. Par ailleurs, le communiqué ministériel introduit la notion de cap (500 MW/an), qui n'est pas sans poser questions sur son application, notamment vis-à-vis d'une différentiation des segments de marché. Ces incertitudes, celles relatives à la marge de tolérance sur l'épaisseur finale du produit intégré dans le plan de toiture, comme celles du pilotage des tarifs en fonction du volume atteint, pénalisent le développement des PMI françaises du photovoltaïque intégré au bâti. Enerplan retient de l'annonce gouvernementale un côté positif : le maintien du tarif sur le résidentiel, segment à fort contenu en emplois. Toutefois, le secteur doit s'attendre à parcourir la courbe d'apprentissage fiscale de façon accélérée et devra être extrêmement vigilant vis à vis des exigences in fine retenues par le CEIAB pour la définition de l'intégration au bâti.
En dehors du résidentiel individuel, les autres segments de marché du photovoltaïque intégré au bâti, après une baisse de 17 à 30 % début 2010, vont connaître une nouvelle baisse de 12% au 1er septembre. Cela devrait très fortement ralentir le développement de nouveaux projets intégrés au bâti au-delà de 3 kW. La volonté du gouvernement, qui vise à contenir la dynamique du marché photovoltaïque en France, risque au final de privilégier le développement des centrales au sol, tout en étouffant d'incertitudes l'émergence du photovoltaïque intégré au bâti. Ce qui n'est pas bon pour les PMI et PME d'un secteur à fort potentiel de valeur ajoutée économique, sociale et environnementale. Enerplan se fera fort, en tant que représentant des acteurs de terrain du photovoltaïque, de faire valoir durant la période d'automne ouverte aux débats sur l'adaptation du système de régulation des tarifs d'achat, la corrélation à rechercher entre l'incitation tarifaire et le contenu en emplois des différents segments de marché. Rappelons que le photovoltaïque intégré au bâti, tel qu'il se développe en France représente déjà plus de 7 000 équivalents temps plein non-délocalisables, avec un potentiel à 14 000 emplois d'ici 2012.
Une baisse cumulée de 40% sur huit mois
Du côté su Syndicat des Energies renouvelables (SER), on sent pointer une once d'exaspération. « Le développement de l'industrie nécessite un cadre économique qui ne soit pas susceptible d'être révisé tous les six mois » insiste Arnaud Mine, président du SER-SOLER. Il poursuit : « Si les acteurs regroupés au sein de SER-SOLER sont prêts à intégrer le principe d'une baisse dans le temps du dispositif de soutien à la production photovoltaïque, ils souhaitent que cette évolution soit plus progressive et fasse l'objet d'une information du marché suffisamment à l'avance. Ce n'est qu'après l'adoption définitive de l'arrêté que les professionnels des énergies renouvelables pourront se prononcer sur le détail précis des modalités de ce texte. Ils rappellent néanmoins que la révision des tarifs intervenue au début de l'année 2010 s'est d'ores et déjà traduite par une baisse allant jusqu'à 30% du tarif d'achat sur certains segments du marché. En l'espace de huit mois, la baisse cumulée du tarif s'élève ainsi pour les grandes installations de toiture intégrée à près de 40%, ce qui remet en cause de nombreux projets.
Le développement de la filière industrielle nécessite en effet la mise en place d'un mécanisme de régulation stable et pérenne. S'il existe une volonté partagée de développer une filière industrielle française comme le montre le communiqué du gouvernement, les professionnels souhaitent sortir au plus tôt de l'instabilité illustrée par la publication de deux arrêtés tarifaires à six mois de distance et disposer d'une visibilité sur les volumes du marché allant au-delà de 500 MW par an et tenant notamment compte de la baisse des coûts de revient intervenue depuis la fixation en 2007 des objectifs du Grenelle. En dépit de l'instabilité du cadre tarifaire, la filière du photovoltaïque est parvenue à créer en l'espace de 2 ans pas moins de 15 000 emplois et environ une dizaine d'unités de production de modules. Des projets d'usines portant sur des capacités de plusieurs centaines de MW sont aujourd'hui très avancés et devraient aboutir en 2011 ou 2012. SER-SOLER souhaite que la concertation annoncée par les deux Ministères renforce cette dynamique en donnant, enfin, un cadre stable à la filière photovoltaïque.