Le plan média du gouvernement sur la publication du nouvel arrêté relatif aux tarifs d'achat de l'électricité photovoltaïque fait grincer des dents. Dans un communiqué de presse qui a précédé la diffusion de l'arrêté, le gouvernement tire en effet à boulets rouges sur les professionnels de la filière photovoltaïque en des termes durs, évoquant des comportements spéculatifs inacceptables et des interventions particulièrement condamnables. Arnaud Mine, président du bureau SOLER, émanation du Syndicat des Energies Renouvelables (SER) a tenu à réagir face à ce procès d'intention, à charge, menée par le pouvoir : « Dans un premier temps, et en tant que président du bureau SOLER, je tiens à dire que nous ne sommes en rien une profession d'escrocs ou de margoulins. Le gouvernement évoque la filière photovoltaïque en des termes durs et injuste. Nous sommes victime d'une instrumentalisation pour servir les besoins de l'administration qui a fait preuve d'un attentisme malheureux et qui, sur le coup, manque cruellement d'élégance ».
Des boucs émissaires
C'est bien connu, la meilleure défense, c'est l'attaque. Les cabinets des ministères ont failli sur ce dossier complexe des tarifs d'achats de l'électricité photovoltaïque dont le nouvel arrêté devait, rappelons-le, sortir dès le mois de juin avant d'être reporté sine die aux calendes grecques. « Si le gouvernement avait fait confiance à la profession pour dialoguer et avancer ensemble, on n'en serait pas là. Il y a eu des crispations. Sur ce problème complexe, ils se sont retrouvés seuls au milieu de voix discordantes, entre lobbies agricoles sur fond de crise et autres opérateurs opportunistes qui n'en demandaient pas tant. Voilà le résultat » poursuit Arnaud Mine. Dans la profession, certains sont révoltés et vivent mal le fait de passer pour des boucs émissaires. Car telle est la communication du gouvernement sur le sujet. La filière photovoltaïque aurait spéculé sur le dos du consommateur d'électricité, lui rognant sans état d'âme son pouvoir d'achat. Infaillible et ingrat.
Alors personne n'est dupe. C'est vrai, des offres déviantes émanant d'un afflux d'opportunistes peu scrupuleux, sont sorties du chapeau en cette fin d'année 2009. Histoire de s'assurer le fameux sésame tarifaire. De nouvelles entreprises auraient ainsi poussé comme des champignons pour arroser EDF Obligations d'Achat de demandes de contrat d'achat à grands coups de dossiers concernant notamment des hangars agricoles virtuels photovoltaïques de 249 kWc de puissance. Une explosion irraisonnée de la demande !
Un deuxième arrêté rétroactif à venir
C'est d'ailleurs ce type de comportements qui a conduit le gouvernement à réagir dans l'urgence et a proposé une sorte de période transitoire à rebours avec la non prise en compte des demandes d'achat effectuées sans la PTF (Proposition Technique et Financière) d'ERDF entre le 1er novembre et le 11 janvier. Cette mécanique de retour sur le passé très contestable et « un peu fort de café » dixit Arnaud Mine, risque hélas, en plus de désamorcer des projets fantasques mettre à mal d'autres projets beaucoup plus structurés et sérieux. Cette mesure devrait par ailleurs, toujours selon Arnaud Mine faire l'objet d'un second arrêté qui devrait suivre celui du 12 janvier 2010. Pourquoi les deux arrêtés sont-ils ainsi séparés ? Le gouvernement craint peut-être des recours sur le prochain arrêté à effet rétroactif, avec à la clé un blocage du processus. Autant voir bloquer la période de transition mais d'un autre côté préserver le nouveau tarif : telle serait la vocation du deuxième arrêté. Il faut savoir que seule une loi peut-être rétroactive dans la mesure oà elle bonifie le dispositif existant. Un décret ne peut en aucun cas être rétroactif. Et si en plus il plombe le dispositif comme c'est le cas … Voilà qui sent l'imbroglio juridique !
Pour le reste, le bureau SOLER, par l'entremise de son président, assure que sa position sur l'arrêté n'est en rien synonyme d'opposition. « Ces tarifs devraient permettre à la profession de fonctionner et à la filière de se développer dans le futur. Il est important de rappeler que la grande majorité de la filière est constitué d'entreprises sérieuses qui partagent, en conscience, les préoccupations éthiques du gouvernement. Il faut donc cesser de nous faire passer pour des voleurs » conclut Arnaud Mine. Reste donc aussi aux organisations professionnelles à faire le ménage chez elles et à édicter une charte des bonnes pratiques pour les entreprises du secteur afin d'éviter certaines dérives. Un gros chantier en perspective à mener !